Le Président de la République Andry Rajoelina ambitionne de faire du pays un  « modèle carbone bleu ». Le lancement de l’Initiative pour les marchés du carbone en Afrique (IMCA) s’affiche alors comme étant une réponse à la lutte contre le changement climatique.

Le 8 novembre, lors de son intervention à l’occasion du World Leaders Summit, en marge de la COP 27 à Sharm el-Sheikh, Egypte, le président de la République de Madagascar, Andry Rajoelina a déclaré : « Notre Grande île dispose de 5603 km de côte. Nous avons donc un immense potentiel avec nos mangroves et nous ambitionnons de devenir le pays modèle carbone bleu. Nous n’avons pas droit à l’échec ». Le président malgache n’a pas manqué de souligner que la Grande île, avec son PEM, a « investi dans des projets innovants pour construire un avenir juste, propre et durable » dont notamment l’exploitation durable de ses côtes. D’après les explications données par le Dr Mahatante Tsimanaoraty Paubert, ministre malgache de la Pêche et de l’Economie bleue et spécialiste des changements climatiques, « le carbone bleu nous renvoie au phénomène de séquestration de carbone par les plantes et végétations aquatiques ». Et dans ce domaine, la Grande île aurait effectivement d’énormes potentialités. Si l’on ne cite que « ses 5 603 km de côte » qui font du pays, « le premier en termes de longueur de côte en Afrique ». La Zone économique exclusive (ZEE) de Madagascar, qui, d’après toujours le ministre de la pêche et de l’économie bleu est « vaste de 1,141,000 km2 » s’affiche également comme une potentialité non négligeable en termes de séquestration de carbone bleu. Sans oublier « la présence du plateau continental vaste de 870 000 km2, dans le sud … une mangrove qui est vaste d’environ 392 000 ha, des zones d’arrière-mangroves, où on peut développer beaucoup d’activités aquacoles, les marais salons qui sont des écosystèmes plus ou moins fermés où se développent des végétations aquatiques qui peuvent s’adapter à cet écosystème plus ou moins saumâtre, les quelques 155 000 ha de lacs » ou encore la quarantaine de fleuves et rivières « dont la longueur totale est d’environ 9 000 km ».

De l’argent propre.

« Aujourd’hui, le marché de carbone est aux alentours de 75 à 80 USD la tonne. Parfois, si on négocie bien, on peut avoir jusqu’à 100 USD la tonne. Sinon, cela pourrait descendre jusqu’à 20 USD la tonne. D’où l’importance de pouvoir multiplier tous les efforts parce que c’est de l’argent propre. C’est-à-dire qu’on conserve, on protège l’environnement et en même temps, on se fait de l’argent. » Le ministre malgache de la Pêche et de l’Economie bleue met en effet l’accent sur l’importance et surtout la pertinence de ce projet de Madagascar. Toutefois, il se trouve que depuis la mise en place du marché carbone, l’accès des pays au crédit carbone a toujours été très compliqué. Comme le souligne le Dr Mahatante Tsimanaoraty Paubert : « Le problème dans le marché carbone est plutôt le processus. La procédure est tellement longue que cela démotive les acteurs. Il faudrait donc plaider pour l’allègement de la procédure. ». L’inauguration de la nouvelle initiative pour les marchés du carbone en Afrique (IMCA) qui s’est également tenue le 8 novembre semble alors répondre au Président malgache. Ce, dans la mesure où cette initiative « vise à soutenir la croissance de la production de crédits carbone et à créer des emplois en Afrique ». L’IMCA ambitionnerait en effet « d’accroître considérablement la participation de l’Afrique aux marchés volontaires ». L’objectif étant que cette croissance permette de « débloquer 6 milliards de dollars de revenus d’ici 2030 et plus de 120 milliards de dollars d’ici 2050 ; soutenir 30 millions d’emplois d’ici 2030 et plus de 110 millions d’ici 2050 ; ainsi que de distribuer les revenus de manière équitable et transparente avec les communautés locales ».

Selon des responsables des Nations unies pour le changement climatique,   Mahmoud Mohieldin et Nigel Topping, « les marchés du carbone offrent une opportunité incroyable de débloquer des milliards pour les besoins de financement climatique des économies africaines tout en élargissant l’accès à l’énergie, en créant des emplois, en protégeant la biodiversité et en favorisant l’action climatique ». Cela constitue donc une autre fenêtre d’opportunités pour Madagascar, dont les potentiels en termes de crédits carbone ne sont plus à démontrer, de capter plus de financements. Le Président ayant fortement plaidé pour que l’accès aux financements climatiques pour les nations « qui subissent les conséquences du dérèglement climatique » soit accéléré et facilité. Cette question du financement est d’ailleurs, selon Mahery Rakotonirina Katia, responsable de la communication du Groupe Thématique – Changement climatique (GTCC), « l’un des plus gros challenge » pour Madagascar et les autres pays d’Afrique. 



Karina Zarazafy

Article publié en partenariat avec MESHA/CRDI pour la couverture de la COP-27 par les journalistes scientifiques africains.