« Enfin un gros poisson. Depuis le temps que nous cherchons un gros poisson », déclare Ndranto Razakamanarina de l’Alliance Voahary Gasy, avec une pointe de triomphalisme, lors d’une conférence de presse convoquée par des organisations de la société civile engagées pour la protection de l’environnement.
Près de quatre-vingts organisations de la société civile civile engagées pour la protection de l’environnement se sont unies dans un communiqué pour dire « non à l’impunité face au trafic des ressources naturelles » et exiger une réponse ferme. L’arrestation d’un député et de quatre de ses collaborateurs, en possession de plus d’une centaine de tortues, est alors perçue comme une opportunité de marquer un tournant dans la lutte. « Nous, organisations de la société civile travaillant dans l’environnement et militant pour une meilleure gouvernance de nos ressources naturelles, condamnons fermement ces agissements. Nous exigeons une sanction exemplaire contre ces personnalités, ainsi que la levée de l’immunité parlementaire des individus appréhendés en flagrant délit », peut-on lire dans leur déclaration commune.
Les tortues ont été saisies dans la nuit du 24 décembre du côté d’Ambohibao par des gendarmes. Malgré les tentatives des suspects de s’opposer aux fouilles en invoquant l’immunité parlementaire, les forces de l’ordre ont procédé au contrôle. La société civile n’a d’ailleurs pas manqué de saluer « le professionnalisme et l’intégrité » de ces dernières.
Pour les organisations environnementales, l’implication d’un élu dans cette affaire révèle l’étendue et la complexité des réseaux de trafiquants opérant à Madagascar. « Cette année, 3 976 tortues ont été saisies (…) du moins, c’est ce qui a été découvert », souligne Ndranto Razakamanarina. Il craint cependant que ces chiffres ne représentent que la partie émergée de l’iceberg. Il insiste ainsi sur l’application ferme de la loi qui fait souvent défaut dans le pays et qui entrave les efforts dans la lutte contre le trafic des ressources naturelles.
Immunité ou impunité parlementaire ?
Le député et ses collaborateurs ont été placés en détention préventive à Tsiafahy après leur comparution devant le parquet du pôle anti-corruption. Leur procès est donc attendu, dans un contexte où la société civile exige des mesures fortes.
Transparency International Initiative Madagascar (TI-MG) a également réagi via une déclaration sur les réseaux sociaux, en braquant cette fois les projecteurs sur l’Assemblée nationale. « Il est essentiel de rappeler que l’immunité parlementaire n’est pas un outil pour couvrir des crimes », déclare-t-elle. TI-MG de souligner que d’autres affaires impliquant des élus, notamment celle de la députée Lanto Rakotomanga, citée dans un trafic de bois précieux à Ambatondrazaka restent toujours sans suite actuellement.
Tolotra Andrianalizah