Le « Liberation Day » (jour de la libération) scandé par le président américain Donald Trump aura été un jour noir pour les pays concernés par la hausse des droits de douane au nom de la « réciprocité ». Madagascar figure parmi les plus touchés, avec des droits de douane désormais fixés à 47 %.

« Ce qu’ils font pour nous, nous le ferons pour eux », lance le président américain Donald Trump à l’annonce des nouveaux droits de douanes réciproques dans un discours qui s’inscrit dans son slogan « Make America Great Again » (Rendre sa grandeur à l’Amérique), devenu pour l’occasion « Make America Wealthy Again » (Rendre à l’Amérique sa prospérité). « Notre pays s’est fait avoir pendant 50 ans, mais ça n’arrivera plus », promet-il depuis la roseraie de la Maison Blanche, le 2 avril 2025. Toutefois, « parce que nous sommes des gens gentils », les droits de douane pour chaque pays correspondront à « la moitié des taxes que l’on nous fait payer », ironise-t-il en indiquant que si la réciprocité était totale, elle nuirait à beaucoup de pays. Il n’en fallait pas tant pour semer la panique dans les pays les plus touchés dont Madagascar.

Avec les produits américains frappés de 93% de droits de douanes, Madagascar se retrouve donc avec un taux de 47% sur les exportations vers les Etats-Unis. Les conséquences de cette décision risquent d’être considérables, car les États-Unis représentent le deuxième marché d’exportation de Madagascar, avec un volume commercial de 786,6 millions de dollars en 2024, contre seulement 53,4 millions de dollars d’importations américaines.

Quelle riposte ?

Le directeur général du commerce Isidore Razanakoto du ministère de l’Industrie et du commerce explique que l’administration Trump a pris cette décision pour rétablir l’équilibre de la balance commerciale entre les Etats-Unis et les autres pays avec qui ils échangent. « Nous avons bénéficié de l’AGOA (African Growth and Opportunity Act) mais également d’un système général de préférences qui fixe les droits de douanes sur nos produits entre 10 et 15% hors AGOA. Ces avantages ont favorisé nos exportations vers les Etats-Unis. En revanche, nous importons peu de produits américains à forte valeur ajoutée, car notre économie ne nous permet pas d’acheter américain », précise-t-il.

Face à cette sombre perspective, une réunion de haut niveau s’est tenue ce jour à laquelle ont participé la ministre des Affaires étrangères Rafaravavitafika Rasata, la ministre de l’Economie et des finances, Rindra Rabarinirinarison, le ministre de l’Industrialisation et du commerce David Ralambofiringa, ainsi que l’ambassadeur de Madagascar Lantosoa Rakotomalala et le directeur général des Douanes Ernest Laikana. La partie malgache a demandé des clarifications auprès de l’ambassade des Etats-Unis à Madagascar en assurant que le gouvernement malgache entendra « mobiliser tous les leviers diplomatiques et commerciaux pour obtenir une révision de ces mesures et garantir un accès équitable des produits malagasy au marché américain » dans le respect de cette réciprocité souhaitée par l’administration Trump.

Isidore Razanakoto indique que Madagascar peut toujours négocier. « Ce genre de mesure nous pousse à mettre en place des accords bilatéraux avec les Etats-Unis car la base est la réciprocité. Il faudra trouver un terrain d’entente qui permettra aux deux parties de tirer profit sur le plan commercial », explique-t-il.

Et l’AGOA dans tout cela ?

Cette décision de l’administration Trump intervient alors que les pays africains bénéficiaires de cette loi s’attèlent à négocier les termes de son renouvellement. « Les 47% concernent les produits agricoles, industriels et les produits manufacturés. Les produits sous AGOA peuvent être frappés mais il faudrait attendre l’interprétation de cette décision car il s’agit d’une loi », poursuit Isidore Razanakoto. Quoi qu’il en soit, il indique que le Liberation Day aura un impact sur les formes qu’une éventuelle nouvelle AGOA prendra. 

Une chose est sûre c’est que les conséquences économiques et sociales des 47% seront aussi considérables que l’importance que le marché américain représente pour le pays. Grâce à l’AGOA, Madagascar est le deuxième fournisseur textile d’Afrique subsaharienne vers le marché américain derrière le Kenya. Cette filière représente 19.4% du PIB, 7% des investissements directs étrangers et emploie plus de 400 000 personnes. Ces nouveaux droits de douanes seront mis en vigueur à partir du 9 avril 2025.

Tolotra Andrianalizah