Importations massives de riz, taux directeur relevé, le gouvernement s’arme contre la poussée inflationniste du moment. Comme un symbole, le président de la République a mené (une nouvelle fois) une distribution de vivres ce jour au nom de la solidarité.
C’est devenu l’une des marques de fabrique du régime Rajoelina : un sac de riz, une bouteille d’huile, du sucre et du savon. 7 200 ménages classés vulnérables des 1er et 4e arrondissements de la capitale ont reçu cette aide alimentaire ce lundi 12 mai, marquant le coup d’envoi d’une nouvelle série de distributions prévues dans toute l’île.
Cette opération intervient quelques jours après la publication de la note de conjoncture de la Banque centrale de Madagascar pour le premier trimestre 2025, indiquant une hausse annuelle de l’inflation de 8,4 % au mois de mars. L’indice des prix à la consommation du riz a grimpé de 12,7 %, soit trois points au-dessus des prévisions initiales. « Pour éviter des pénuries et stabiliser les prix, des importations massives ont été effectuées pour garantir un approvisionnement suffisant sur le marché national », précise la note.
Une situation qui contraste toujours avec l’ambition présidentielle en matière de souveraineté alimentaire. Malgré les terres arables vantées par Andry Rajoelina lors du dernier sommet de la Commission de l’océan Indien, Madagascar demeure structurellement dépendant de l’extérieur pour nourrir sa population.
Des taux en hausse depuis 2019
Autre levier activé pour freiner la hausse des prix, le taux directeur de la Banque centrale, relevé à 12 % depuis le 7 mai. La Banque centrale justifie cette décision par le dépassement des prévisions d’inflation, indiquant une amplification des pressions inflationnistes. Mais dans un pays où l’accès au crédit reste difficile, une telle mesure revient de fait à resserrer encore davantage l’étau autour des producteurs locaux dont les agriculteurs et des petites entreprises. Si l’institution reconnaît que ce durcissement monétaire pourrait freiner l’activité à court terme, elle estime que cela est nécessaire pour préserver la stabilité macroéconomique à long terme.
En août 2024, la Banque centrale avait déjà relevé le taux de la facilité marginale de prêt de 11 à 11,5 %, invoquant une inflation persistante tirée notamment par les prix alimentaires – en particulier le riz. En remontant dans les archives de politique monétaire, on observe que la Banque centrale n’a cessé de relever ses taux depuis 2019, où la facilité de prêt marginale était à 4,4 %.
Les justifications varient selon les périodes, mais le constat reste le même. Face à chaque résurgence inflationniste, le gouvernement adopte une posture défensive sans parvenir à poser les bases d’une réponse structurelle. Les réponses sont effectivement réactives et les orientations stratégiques annoncées depuis l’Initiative pour l’Emergence de Madagascar se font attendre.
En face, l’opposition ne semble pas mieux armée. Face aux errements d’un pouvoir qui semble naviguer à vue, elle peine à imposer une alternative claire. Si les critiques sur l’inflation sont virulentes, elles ne s’accompagnent que rarement de propositions concrètes. Peu présente sur les terrains économiques, l’opposition, tout comme le régime d’ailleurs, évite les débats de fond, préférant orienter les discussions vers des sujets plus sensationnels.
Tolotra Andrianalizah