Le choix de l’intitulé d’une session du Forum de la société civile de la SADC, « Espace civique en crise » est révélateur de la situation dans la région. Les panélistes qui y ont participé s’accordent à confirmer le recul de l’espace civique et de la démocratie dans leur pays respectif.
« L’espace civique est attaqué, lance la directrice exécutive d’Amnesty Zimbabwe Lucia Masuka. Les arrestations arbitraires sont courantes au Zimbabwe ». L’activiste du royaume de l’Eswatini Tanele Maseko se veut plus directe en indiquant que cet espace civique est mort dans son pays. « Les gens n’osent pas parler de peur d’être tués ou arrêtés », poursuit-elle. Tito Magosi de la Tanzanie, qui a expérimenté la prison, déclare que la détention est utilisée comme un outil pour réduire au silence les critiques. Même son de cloche chez le coordonnateur du mouvement de la société civile malgache Rohy Harijaona Andriamoraniaina. « La situation à Madagascar est similaire à ce qui se passe dans les autres pays », indique-t-il en pointant la propension des dirigeants successifs à décider sans consulter la population. « Réagir est très difficile », ajoute-t-il. Pour le cas de Madagascar, Harijaona Andriamoraniaina a pris exemple sur les habitants de l’île de Sakatia dans le nord, menacés d’expulsion. Il souligne ainsi le rôle actif que joue la société civile dans ce genre de situation où les communautés locales font appel aux organisations pour les soutenir dans leur combat.
Mal commun, solution commune
Ces révélations ramènent à la question de la protection des défenseurs des droits humains dans un contexte où « l’autoritarisme est en progression », selon les mots du chargé de campagne d’Amnesty International dans la région de l’Est et de l’Afrique australe Nkanyiso Mtolo qui a modéré la session. « Les défenseurs des droits humains ont besoin d’une protection particulière, car leur travail est de plus en plus menacé », déclare-t-il en déplorant que la SADC n’ait rien dit à propos des défenseurs des droits humains dans sa déclaration, ni même sur les droits humains en général. « Nous menons constamment campagne pour la mise en place d’un cadre juridique qui protège les défenseurs des droits humains », poursuit-il.
A l’heure actuelle, Madagascar ne dispose pas encore d’une telle loi malgré le plaidoyer de la société civile. En attendant, celle-ci s’organise pour protéger les défenseurs des droits humains et les lanceurs d’alerte. « C’est dans ce sens que nous devons travailler ensemble pour essayer d’avoir un cadre institutionnel d’intervention cohérent entre différents pays pour la société civile mais aussi un cadre de financement qui nous permet de réagir par rapport aux menaces », lance Harijaona Andriamoraniaina à l’endroit des membres des organisations de la région.
Tolotra Andrianalizah